C'est quoi la finance islamique?


I. Présentation de la Finance Islamique

a) Définition de la finance islamique

La finance islamique est un système financier qui fonctionne sur la base d’un corpus de règles nommé la Shari’a . En effet, sur le plan juridique, l’islam repose sur une hiérarchie des textes et des sources qui alimentent la jurisprudence islamique, que l’on nomme le fiqh.

Comme les systèmes financiers conventionnels, la finance islamique dispose de banques, d’un marché de capitaux, des sociétés d’investissement et de compagnies d’assurance.

Cependant, ces entités sont régies à la fois par le droit commercial islamique (fiqh mua’malat) et les règles de l’industrie financière conventionnelle.

La finance islamique promeut l’entrepreneuriat (strong), accepte le profit et tolère la prise de risque.

Toutefois, ces prises d’initiatives économiques doivent obéir à des conditions sine qua none mentionnées ci-dessous.

b) L’interdiction de l’usure – Riba

La pratique de l’intérêt (riba) est interdite. Il n’y a pas de distinction entre l’usure et l’intérêt puisque ce sont les fruits de l’écoulement du temps et non de la rentabilité du projet.

c) Le partage des profits et des pertes

Le risque économique associé au projet, entre l’apporteur en capital et celui qui l’utilise, doit être partagé de manière équitable. Ainsi, la banque, les dépositaires et les emprunteurs partagent tous les risques et les revenus des projets financés par les dépôts.

d) L’interdiction de l’incertitude et de la spéculation – Maysir & Gharar

La prise de risque est la seule source légitime de rentabilité. Toutefois, l’aléa (maysir) et la sélection adverse (gharar) le sont, car ils peuvent aboutir à de l’incertitude sur l’objet du contrat et à la spéculation. En définitive, pour être vendu, le contrat doit avoir des conditions fixes et connues de toutes les parties avant ratification de l’accord.

e) L’adossement à un actif tangible

L’idée principale en islam est que l’argent n’est qu’un moyen d’échange et non l’objet d’échange. L’argent n’est qu’un capital potentiel et ne sera réel qu’après son association avec une autre ressource, en l’occurrence le travail et l’effort, pour entreprendre une activité productive.

Ainsi, il ne remplit pas le même rôle que dans la finance conventionnelle : celui de valeur temporelle. Cette interdiction écarte tout profit tiré d’une transaction purement financière. Par conséquent, toutes les opérations financières doivent être adossées à un actif tangible, ce qui assure une certaine stabilité, traçabilité et transparence dans les opérations.

f) L’interdiction de certains produits et activités

En islam, il y a une obligation de responsabilité sociale. Conformément à l’éthique musulmane, certains secteurs d’activité sont prohibés tels que : les jeux de hasard, alcool, armement, pornographie…

 

II. Une finance qui répond à des besoins universels.

La finance islamique est un système qui prône l’équité. Des considérations morales sont sous-jacentes à cette prohibition de l’intérêt. Faire usage d’un taux d’intérêt est considéré comme injuste.

Ce taux empêche aux personnes les plus démunies de la société d’accéder à un financement. De plus, le rapport de force entre le demandeur et le pourvoyeur est biaisé. Le premier doit fournir un effort supplémentaire quant au remboursement du montant obtenu tandis que le second renforce sa position de dominant.

Prenons le cas d’un financement de projet dans le système conventionnel. Le taux fixé par le financeur dans un projet octroie une répartition inégale du risque et des profits. En effet, l’investisseur perçoit une rémunération qui n’est pas liée à la réussite ou à l’échec du modèle économique de l’entreprise, alors que le risque est principalement supporté par l’entrepreneur. Si la société réussit son projet entrepreneurial et génère des revenus importants, l’investisseur percevra un montant réduit à cause du taux tandis que l’entrepreneur pourra jouir d’une part plus importante des bénéfices.

Ainsi, le profit attribué au capital est fixé tandis que celui qui est attribué au travail est variable et entaché d’incertitude, ce qui rend la chose non-équitable. Toutefois, dans un système islamique, l’approche est différente car le risque sera supporté par les deux parties et les bénéfices ne seront pas limités au taux mais en fonction du succès du projet.

La vente à découvert n’est pas autorisée. Cette interdiction vise la spéculation, car la finance se doit de contribuer à l’économie réelle et non l’inverse. La finance islamique apporte un cadre pour ne pas se retrouver dans des jeux à somme nulle ou dans un casino. Ce principe moral a permis aux banques islamiques de résister à la crise de 2008 puisqu’elles n’étaient pas exposées à ces crédits hypothécaires dits « SubPrimes ».

Enfin, il y a un autre principe qui est un vecteur d’équité sociale. Il s’agit de la Zakat.

Elle se définit comme une aumône « purificatrice » légale. L’ensemble des musulmans imposables doivent reverser une part de leur patrimoine non productif (2,5%) dès que ce dernier dépasse le seuil de 2 931 € (au 29 juin 2018). Elle est destinée aux œuvres caritatives et aux plus démunis. Ainsi, la Zakat permet une redistribution de la richesse et une réduction des inégalités. La banque islamique peut réaliser ce prélèvement à la source et gérer la redistribution de cet impôt selon des modalités bien définies.

 

III. Les principaux instruments en Finance islamique

a) Mudharaba

La mudharaba est une opération dans laquelle l’investisseur (raab al-mal) fournit le capital à un entrepreneur (mudharib) qui apporte son expertise. L’entrepreneur est responsable de la gestion de l’activité et agit en tant qu’agent. Les bénéfices sont partagés entre les deux parties selon une répartition prévue dans le contrat. En revanche, si la perte se réalise, elle incombe à l’investisseur. L’entrepreneur ne prend que la rémunération de son travail de gérant. Toutefois, en cas de négligence ou d’erreur de gestion, l’entrepreneur pourra être tenu pour responsable et devra supporter les pertes.

b) Musharaka

C’est un contrat dans lequel les investisseurs participent au financement d’un projet, en partageant les profits et les pertes avec l’entrepreneur au prorata du capital apporté. Ainsi, les investisseurs ont la possibilité de participer à la gestion du projet s’ils le désirent et assument les risques avec l’entrepreneur.

c) Murabaha

Son principe est celui de l’achat-revente avec marge. Ce concept suppose que le financeur achète un actif donné pour le client final n’ayant pas les moyens de le faire. Ensuite, le financeur le revend au client à un prix avec une marge convenue d’avance entre les deux cocontractants.

d) Ijara

C’est un contrat dans lequel l’acheteur est locataire de l’actif avec une option d’achat à l’issue de la durée de location. L’Ijara est différent d’un crédit-bail, car celui qui met le bien en location doit impérativement en être le propriétaire pendant toute la durée de la location. Par ailleurs, l’acheteur n’est pas soumis à des pénalités en cas de retard, et c’est le bailleur qui supporte le risque associé à l’actif.

e) Takaful

C’est un ensemble de personnes qui s’assurent mutuellement. Les membres d’une compagnie d’assurance takaful sont à la fois assureurs et assurés, ce qui permet de mutualiser les risques et répartir les pertes éventuelles entre l’ensemble des assurés. Ils détiennent les fonds, la compagnie est gestionnaire et se rémunère grâce à des commissions.

f) Sukuk

Le sukuk est un certificat d’investissement conforme à la Shari’a. Ce produit peut être assimilé à une émission obligataire. Toutefois, il doit être adossé à un actif tangible ou à l’usufruit de celui-ci. Ainsi, les flux financiers permettant la rémunération des porteurs de ses titres proviennent du sous-jacent concerné et non de l’écoulement du temps. Le remboursement des investisseurs se réalise par la vente du sous-jacent ou le rachat des titres.

 

IV. La finance islamique pourrait faire sens en France

La croissance de la Finance Islamique en France reste timide par rapport à son évolution globale, notamment en Afrique et Asie du Sud-Est.

Ce constat se justifie par un certain nombre de paradoxes.

Bien que les institutions financières françaises proposent des offres dites « islamiques » dans le reste du monde, celles-ci restent quasi-inexistantes à l’échelle locale alors que le cadre règlementaire y est favorable depuis 2008.

Malgré une forte présence dans les marchés internationaux, les banques françaises ne contrôlent qu’une part minime des investissements en finance islamique. Alors que la tendance est en hausse continue depuis 2013 (10-15% par an).

Même si la finance islamique a eu un certain succès au Royaume-Uni, les raisons de ce manque d’engouement s’expliquent par des facteurs sociologiques.

Les populations immigrées anglo-saxonnes et francophones diffèrent puisque les premiers ont été en provenance de l’Asie du Sud-Est et du Golfe, où le système bancaire islamique avait été mis en place et avec lequel ils se sont familiarisés. Tandis que les seconds n’ont pas joui de ce système dans leurs pays d’origine.

Les profils des musulmans de France divergent tant dans leurs approches de l’islam que de la connaissance de celui-ci. En effet, certains accepteront de souscrire à des prêts à intérêt tandis que d’autres le refuseront.

Cependant, il y a une demande latente qui se renforce en France et grâce à laquelle la finance islamique pourrait connaître son éclosion.

Effectivement, la France pourrait attirer les liquidités issues des rentes pétrolières qui recherchent des investissements conformes à la Shari’a, car elle dispose d’une forte visibilité et crédibilité en matière bancaire et financière.

Les musulmans de France, qui représentent l’une des plus grandes communautés européennes n’ont pas à disposition une offre conforme à leurs principes religieux, ce qui leurs empêchent une inclusion financière totale, notamment dans les placements d’épargne.

Néanmoins, quelques initiatives pertinentes ont été réalisées dans l’hexagone mais cela reste encore limité au regard de son potentiel réel.

Par conséquent, attirer les liquidités issues des rentes pétrolières et celle de la communauté musulmane de France pourrait générer des retombées dans l’économie française, puisqu’elle offrira un accès à un nouveau pool d’investisseur et générera des emplois potentiels grâce aux sukuk destinés aux projets d’infrastructures par exemple.

Pour plus de précisions vous pouvez contacter nos conseillers SUNNAKAPITAL qui se feront un plaisir de vous répondre…

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